Au Salon du Livre, un de mes lecteurs m’a apporté une photocopie des commentaires que suscite sur votre site la publication de " Voici venir le Fiancé ". Certains sont très éclairants, mais d’autres, dont les auteurs semblent obsédés par le désir de donner les " clefs " du roman, me surprennent un peu. Que les universitaires de 2006 soient soucieux de découvrir qui sont les modèles de la Mme Arnoux de " L’Education sentimentale " ou du Lévine d’ " Anna Karénine ", cela est naturel, tel leur métier ; mais à l’époque où ont paru ces romans, les lecteurs de Flaubert et de Tolstoï s’en fichaient, et je dois dire que moi-même, qui ne suis pas un universitaire, qui suis un simple admirateur de ces deux grands maîtres, je m’en fiche comme de ma première barboteuse.
Les clefs de mes romans ne devraient pas intéresser mes lecteurs, elles n’ont pas la moindre importance, elles sont de l’ordre de ce que les Anglais appellent le " gossip ". Ce qui compte, ce n’est pas la marmite aux sorcières de l’auteur, le mixte d’invention et de réalité, les transpositions, les traits empruntés ça et là, le vécu et l’imaginaire, bref la cuisine secrète du romancier ; ce qui compte, c’est le résultat final, c’est l’œuvre d’art achevée.
Je lis dans ces commentaires que le personnage de Delphine, la jeune cinéphile qui travaille dans une revue de cinéma, est " très reconnaissable ". Mais reconnaissable par qui ? Et pourquoi personne ne dit cela des personnages de Mathilde, ou de Zouleikha, ou de Lioubov, ou de Stefanie, ou de Constance ? Ne serait-ce pas parce que les jeunes filles qui ont partagé ma vie durant des années et à qui j’ai emprunté des traits pour créer ces personnages ne se sont pas, elles, répandues dans tout Paris et sur Internet pour raconter nos amours ? Parce que ces amours, au contraire, elles ont tenu à les garder secrètes ?
Je me permets de rappeler à mes lecteurs que ce que reproche Raoul Dolet à Delphine, c’est précisément son intempérance verbale, son incontinence narcissique, les confidences sur sa vie amoureuse qu’elle fait à tout le monde et à n’importe qui, au point que de nombreux blogs écrits par des inconnus parlent - au mépris du respect le plus élémentaire de la vie privée - des amours du cinéaste Raoul Dolet et de la jeune cinéphile Delphine.
Dolet et Delphine sont des personnages de fiction. Si leur histoire n’était pas totalement imaginaire, si j’avais eu le malheur d’avoir une maîtresse aussi indiscrète que l’est Delphine dans mon roman, ne comptez pas sur moi pour vous l’avouer ; mais si cela était le cas, je dirais à cette jeune personne que, après avoir trompeté nos amours sur la Toile comme elle l’a fait pendant des mois et des mois, elle aurait un sacré culot d’oser se plaindre si un jour ses amis et correspondants internautes devaient la " reconnaître " dans un personnage d’un de mes romans. Oui, en vérité, un sacré culot.
Cela dit, le personnage de Delphine est un très beau personnage, émouvant, drôle, que j’ai composé avec beaucoup de tendresse. Certes, elle est insupportable, indiscrète, envahissante, saoulante, mais n’est-ce pas le cas de milliers de jeunes filles qui vivent leur premier amour ? Delphine reconnaissable ? Oui, mais dans le sens où, en la créant, j’ai créé un archétype, et des milliers de jeunes personnes du sexe, férues d’Internet et de téléphone portable pourront, si elles ont le courage de la lucidité, s’y reconnaître.
C'est un vrai plaisir de voir un écrivain intervenir ainsi sur son forum.
Effectivement, Delphine n'est sans doute qu'un personnage de roman. En effet, aucune jeune personne ne s'est répandue sur le net sur ses amours avec Gabriel Matzneff. Quelques internautes ont juste le souvenir d'une jeune femme défendant un écrivain, parfois maladroitement mais toujours sincèrement. Elle a sans doute aussi parlé avec ses amis, mais qui ne le fait pas ?
Je suis d'accord avec le portrait dressé par Gabriel Matzneff de son personnage. Delphine a beaucoup de qualités. Elle n'est pas détestable.
Erreur : deux jeunes internautes se sont bel et bien répandues sur leurs amours avec Gabriel Matzneff. C'était sur la précédente version de ce forum, et cela provoqua sa fermeture. Mais ces deux jeunes indiscrètes n'ont rien à voir avec la jeune femme plusieurs fois évoquée ici.
Je pense que le verbe "répandre" est un peu fort si elles se sont limitées à un forum, d'autant plus que notre ami webmestre peut rapidement supprimer ce qui est attentatoire à la vie privée.
Je fais une recherche pour savoir qui il est précisément et je tombe sur des gens passionnés. Ca me fait bizarre. et oui je suis un Matzneff. Par contre je le connais pas alors je peux pas vous parler de lui.